Laurence Freeman o.s.b., « La Méditation », in : Jésus le Maître intérieur, chap. 10, Albin Michel, 2002, pp. 270-271.
En disant qu’il ne faut pas nous inquiéter, Jésus ne nie pas la réalité des problèmes quotidiens. C’est l’anxiété qu’il nous demande d’abandonner, non la réalité. Apprendre à ne pas s’inquiéter est une tâche ardue… [Cependant], même le mental moderne, malgré son « trouble du manque d’attention », dispose de la capacité naturelle de rester tranquille et de dépasser les fixations. Au fond de lui-même, il découvre une clarté qu’il possède en propre, où il peut demeurer en paix, débarrassé de ses inquiétudes. La plupart d’entre nous ont bien une demi-douzaine d’inquiétudes favorites que nous suçons inlassablement comme des bonbons amers, et dont, pour rien au monde, nous ne voudrions nous séparer. Or, Jésus nous exhorte à dépasser la peur d’abandonner nos inquiétudes, la peur de la paix elle-même. La pratique de la méditation est une manière de mettre en œuvre son enseignement sur la prière ; elle prouve par l’expérience que le mental humain peut choisir de ne pas s’inquiéter. […]
Ce n’est pas un choix au sens où nous choisissons une marque de café plutôt qu’une autre. C’est le choix de s’engager. La voie du mantra est un acte de foi et non un exercice de la toute-puissance de l’ego. Tout acte de foi cache une déclaration d’amour. La foi prépare le terrain où la graine du mantra germera dans l’amour. Nous ne créons pas le miracle de la vie et de la croissance par nous-mêmes, mais nous sommes responsables de son déploiement. Accéder à la paix du mental et du cœur – au silence, à l’immobilité et à la simplicité – exige non pas la volonté d’un super-fonceur mais la fidélité dans le temps et l’attention inconditionnelle d’un disciple.
Rappelez-vous : Asseyez-vous. Restez immobile et le dos droit. Fermez doucement les yeux. Soyez détendu mais vigilant. En silence, intérieurement, commencez à dire un mot unique. Nous recommandons le verset de prière « Maranatha » qui signifie « Viens, Seigneur » en araméen. Récitez-le en détachant chaque syllabe. Ecoutez-le tout en le disant, doucement, mais sans discontinuer. Ne retenez et n’entretenez aucune pensée, aucune image, spirituelle ou autre. Laissez passer les pensées et les images qui surgissent. Ramenez simplement votre attention – avec humilité et simplicité – sur la répétition intérieure de votre mot dans la foi, du début à la fin de votre méditation.
Christian Bobin, extrait de L’homme-joie, Paris, l’Iconoclaste, 2012.
Nos pensées montent au ciel comme des fumées. Elles l’obscurcissent. Je n’ai rien fait aujourd’hui et je n’ai rien pensé. Le ciel est venu manger dans ma main. Maintenant c’est le soir, mais je ne veux pas laisser filer ce jour sans vous en donner le plus beau. Vous le voyez le monde. Vous le voyez comme moi. Ce n’est qu’un champ de bataille. Des cavaliers noirs partout. Un bruit d’épées au fond des âmes. Eh bien, ça n’a aucune importance. Je suis passé devant un étang. Il était couvert de lentilles d’eau ̶ ça, oui c’était important.
Nous massacrons toute la douceur de la vie et elle revient encore plus abondante.