Extrait de Laurence Freeman osb, Jésus, le maître intérieur, « L’Esprit », Albin Michel, 2002, p. 235-236.
La joie de réaliser la vérité est la félicité de l’Esprit. Elle efface la honte de tous les échecs antérieurs. Conscients de la présence amicale de cet Esprit de vérité à nos côtés, nous pouvons mieux tolérer chez les autres et en nous-mêmes ce qui n’a pas encore atteint la plénitude de l’être… La vérité est tolérante parce que l’Esprit est amour qui pardonne. Elle permet au mensonge de survivre, pour le moment, comme un parent aimant reconnaît à son enfant le droit de faire des erreurs. La vérité embrasse plutôt qu’elle n’excommunie ses ennemis. Elle se manifeste après une longue distillation de l’expérience. Ce n’est pas un objet ou une réponse que l’on contemple et met à l’abri. Si la vérité n’a plus d’ego à traverser, la communication se dilate en communion.
L’Esprit est l’absence d’ego, le vide infini, de Dieu. Elle1 remplit tout de son vide et contient « toute la vérité ». Seul le vide peut contenir le tout. Revenant vers nous dans l’Esprit de vérité, en ami et en maître, Jésus peut donc être à la fois homme et Dieu, historique et cosmique, personnel et universel. Il est onde et particule, pleinement individué, capable d’être son moi individuel unique et d’être inséparable de toute chose. Ainsi sa mort, toute mort, acquiert un sens et une nécessité.
Dans l’évangile de Jean, la Résurrection et la descente de l’Esprit sont vues comme un seul événement. Le soir de Pâques, Jésus vint et se tint au milieu de ses disciples qui, terrorisés, s’étaient réfugiés dans une pièce fermée à clef. Son premier mot fut « shalom ». Ce mot hébreu d’une grande densité, qui signifie « paix », invoquait la bénédiction de l’harmonie qui règne entre tous les ordres d’existence. Shalom émane directement de l’harmonie divine qui est l’Esprit. La recevoir, c’est avoir part à cette paix au-delà de toute compréhension.
Ensuite, Jésus souffla sur eux en disant : « Recevez l’Esprit Saint. » Son souffle, véhicule de l’Esprit, portait ses paroles dans leurs intelligences et leurs coeurs attentifs. Puis il leur donna le pouvoir de pardonner les péchés. Ce pouvoir de pardonner… est un charisme de l’Esprit parce que le pardon lève le plus grand de tous les obstacles à la communication. Il guérit les blessures, confesse la vérité qui libère, console dans la douleur, apaise la colère, efface le ressentiment, parvient à réconcilier les ennemis. Quiconque connaît la vérité a le pouvoir de pardonner… Nous apprenons, par l’effet qu’elle produit sur nous-mêmes, que l’Esprit est une amie qui ne fait pas de différence entre ses amis et qui libère la force d’aimer, de pardonner sans fin. On ne peut l’observer mais on la reconnaît aux traces silencieuses, éclairantes, réparatrices ou consolatrices de son passage.
(1) L’auteur a mis l’Esprit au féminin.
Après la méditation
Hildegard von Bingen, « Antiphon for the Holy Spirit » (Antienne au Saint-Esprit), extrait de Women Mystics, ed. Carol Lee Flinders, New York, HarperCollins, 1995, p. 17
L’Esprit de Dieu
Est une vie qui donne la vie,
Racine de l’arbre-univers
Et vent dans ses branches.
Effaçant tous les péchés,
Elle panse les plaies de son huile.
Elle est vie étincelante.
Attirant toute louange,
Elle est tout-éveil,
Toute-résurrection.