Extrait de la Lettre de Laurence Freeman, osb, Bulletin de médiation chrétienne, Vol. 30, No. 1, Mars 2006.
On s’agrippe toujours à ses sauveurs imaginaires sans se rendre compte qu’aucun sauveur véritable ne permet qu’on s’agrippe à lui. « Ne me retiens pas… Je ne suis pas encore monté vers le Père. » Le vrai guérisseur laisse le lien se nouer, mais ne le laisse pas dévier dans l’addiction. Pour les chrétiens, Jésus était un médecin de l’âme humaine plutôt que le fondateur d’une nouvelle religion. Son sens profond – et tous ces niveaux d’identité ouverts par sa question « Qui dites‐vous que je suis ? » – ne se laissaient découvrir que dans la liberté qu’il offrait à ceux qui apprenaient de sa douceur et de son humilité. Ceux surtout qui acceptaient le joug léger de son amitié.
Les maîtres du désert ont compris que faire face aux dures vérités de nos illusions et dépendances est le fruit du travail de nombreuses tentations. . . Ils ont appelé cela le combat contre les démons, mais ils savaient que les démons sont en nous. On ne fait qu’éluder le combat en les projetant à lʹextérieur. Lʹintégrité de la personne, notre liberté dʹêtre nous‐mêmes et d’aimer les autres, se perfectionne dans la tentative que nous saisissons chaque fois que nous nous asseyons pour faire le travail du silence.
Après la méditation
Rumi, “The soul’s Friend”, extrait de The Soul of Rumi: A New Collection of Ecstatic Poems, trad. Coleman Barks, New York, HarperCollins, 2001, p. 190.
L’Ami de l’âme
Écoute ton être essentiel – l’Ami.
Quand tu ressens du désir, sois patient
Et aussi prudent, modéré avec la nourriture et la boisson.
Sois comme une montagne dans le vent.
As‐tu remarqué comme elle bouge peu ?
Des illusions charmantes se présentent pour t’éloigner.
Donne‐leur congé avec quelque excuse :
« J’ai une indigestion, » ou « Je dois voir mon cousin ».
Tu pêches,
lʹhameçon et son appât valent peut‐être cinquante ou soixante pièces dʹor,
mais valent‐ils vraiment ta liberté dans lʹocéan ?
Quand tu voyages, ne tʹéloigne pas de ton sac.
Je suis le sac qui contient ce que tu aimes.
Tu peux être séparé de moi !
Prends soin de vivre dans la joie de cette amitié.
Ne pense pas : « Mais ceux‐là aussi m’aiment. »
Il y a des invitations qui résonnent comme le sifflet de l’oiseleur pour la caille, amicalement,
Mais pas tout à fait comme le souvenir qu’a laissé l’appel de l’Ami de ton âme.