Lectures hebdomadaires – S’ouvrir à la merveille de Dieu

John Main osb, extrait de “Two Words from the Past”, The Heart of Creation, Darton, Longman & Todd, Londres, 1988, pp. 43-44.

Récemment, un jeune homme est venu me voir et m’a demandé comment je pouvais supporter de voir tous les jours la même chose par la fenêtre. « Cela ne vous rend pas dingue ? » Mais la vraie question devrait plutôt être celle-ci : « Comment se fait-il que nous puissions toujours voir tant de choses en regardant tous les jours par la même fenêtre ? » Les premiers Pères savaient que l’ennui vient du « désir », le désir de réussite ou de gloire, de nouveauté, de changement d’environnement ou d’activité, de relations différentes, de certitude.

La prière pure restreint le désir. Dans l’immobilité de la prière, de plus en plus calme à mesure que l’on approche de la Source de tout ce qui est, de tout ce qui peut être, on est tellement rempli d’émerveillement qu’il n’y a plus de place pour le désir. Ce n’est pas tant que l’on transcende le désir mais plutôt qu’il n’y a simplement plus de place en nous pour un tel désir. Toute la place est occupée par la merveille de Dieu. L’attention, qui s’éparpille en désirs, est rappelée et absorbée en Dieu. […]

En méditant, nous lâchons le désir de contrôler, de posséder, de dominer, et à la place, nous ne cherchons qu’à être qui nous sommes, et en étant la personne que nous sommes, nous sommes ouverts au Dieu qui est.

 

Après la méditation

 

 

Christophe André, Méditer jour après jour, Paris, L’Iconoclaste, 2011, pp. 72-73.

Se libérer de ses pensées

« Je pense donc je suis » proclamait Descartes. Paul Valéry ajoutait : « Parfois je pense, parfois je suis. » Et la pleine conscience conclut : « Je ne suis pas seulement ce que je pense ». Avec les deux sens : « Je suis » au sens « d’aller derrière » et « je suis » au sens d’ « être ». C’est ce qu’on appelle la « défusion » dans les psychothérapies cognitives : s’efforcer de diminuer la confusion entre mes pensées et ma conscience. Comprendre que mes pensées ne sont qu’un des éléments de ma conscience, et non ma conscience entière. Ne plus dépendre de nos pensées, sans pour autant les refuser : simplement entrer dans une relation différente avec elles.

Ce n’est pas la même chose de se dire « ma vie est triste » et « Je suis en train de penser que ma vie est triste. » En identifiant mes pensées comme des phénomènes de l’esprit, je verrai mieux que, dans ces dernières, se nichent beaucoup de jugements de valeur, d’automatismes, d’impulsions, avec lesquels je n’ai pas forcément à être d’accord. Cette expérience un peu étrange de se dissocier de son propre mental, cet effort de se servir de son esprit pour ne plus être piégé par lui, c’est ce que propose la pleine conscience.

Elle m’apprend à ouvrir un espace de réflexion, à cultiver une expérience de mise à distance et d’observation. Elle m’aide à faire la différence, comme au cours d’une soirée, entre le bruit de fond et la conversation qui m’intéresse. Ou à choisir finalement de sortir, de quitter le tumulte et d’aller écouter la rumeur de la nuit…

Peu à peu, la différence entre « penser quelque chose » et « s’apercevoir que l’on pense quelque chose » deviendra une évidence. C’est ce que l’on appelle la lucidité, et ça nécessite un travail régulier.

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