Lectures hebdomadaires – Le but de toute vie

John Main osb, extrait de “Integrity”, Word Made Flesh, Londres, DLT, 1993, pp. 55-56.

On dirait bien souvent que nous traversons la vie précipitamment alors que dans nos cœurs brûle la flamme essentielle de l’être. Cette course effrénée l’amène souvent à un point de quasi extinction. Mais lorsque nous nous asseyons pour méditer, dans le repos et la simplicité, la flamme se met à briller avec fermeté. Si l’on cesse de penser en termes de réussite, concentré sur sa propre importance, la lumière de la flamme nous aide à nous comprendre et à comprendre les autres en termes de lumière, de chaleur et d’amour.

Le mot de prière nous amène à ce point d’immobilité qui permet à la flamme de l’être de briller. Il nous enseigne ce que nous savons mais avons tendance à oublier : nous ne pouvons pas vivre la vie en plénitude si elle n’est pas fondée sur une raison d’être sous-jacente. La vie a une signification et une valeur ultimes qui ne se découvrent réellement que dans la silencieuse stabilité de l’être, qui est notre enracinement essentiel en Dieu.

Comme il est facile de laisser la vie devenir routinière ! Les rôles prennent facilement la place de l’être. Nous nous installons dans les rôles routiniers de l’étudiant, de la mère, du mari, du pdg, du moine ou de n’importe quoi… Jésus est venu nous dire que la vie, ce n’est pas jouer un rôle ou faire fonctionner un système. La vie a un sens, une direction, que l’on éprouve dans les profondeurs les plus silencieuses de l’être. Notre valeur vient de qui nous sommes en nous-mêmes, non de ce que nous faisons dans le rôle que nous jouons. […]

Nous devons être ouverts à l’amour qui nous sauve de l’illusion et de la superficialité. Nous devons vivre de cette sainteté personnelle infinie que nous détenons en tant que temples de l’Esprit Saint. Découvrir que le même Esprit qui créa l’univers réside en nos cœurs, et, en silence, donne à tous sa tendresse, tel est le but de toute vie.

 

Après la méditation

 

 

Philippe Mac Leod, Variations sur le silence, Ad Solem 2018 (Philippe Mac Leod vient de nous quitter,
frère du silence et de la poésie…)

“L’homme qui prie porte en son silence
toute la semence des siècles, les voix de la nuit,
les grands murmures d’univers
chaque instant gonflé de sève immémoriale
chaque goutte de temps qui perle
abreuvant des mondes en fleurs
dont le clair parfum s’élève plus haut que les airs.

L’homme qui prie
l’homme qui se tient droit
comme une croix au bord des chemins,
entre sans une ombre dans la vie nue,
la vie muette,
la vie à l’intérieur de la vie,
comme le feu au dedans de la flamme,
la flamme dans le noir de l’éblouissement,
la vie plus loin que la vie
celle qui tremble et tient toute sa force
de ce murmure qui dure et se prolonge
la vie qui s’échappe
et dit encore la vie dans sa fuite
la vie jaillie du creux de la chair,
la vie comme une flamme libre.

L’homme qui prie a fini par faire un creux dans la terre,
ainsi du lièvre dans l’herbe des collines
et le monde dort,
le monde seul dans le monde,
seul au monde avec l’astre froid au milieu de la nuit,
le battement sourd d’une lueur
semblable à un visage sous les reliefs de la terre
ô les minces plis de l’espace
comme la peau d’un frisson
loin derrière les étoiles qui clignotent,
dans des déserts où plus personne à cette heure
ne se hasarde.”

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