Laurence Freeman osb, extrait des réflexions sur la semaine sainte 2008, publié sur www.wccm.org.
En ce moment, il n’y a pas un nuage dans le ciel et la lumière claire fait ressortir toutes les couleurs, les ombres et les textures cachées de la mer, des arbres et des montagnes. La nature nous aide à croire que nous sommes en chemin vers la lumière du Christ, le soleil de la résurrection qui ne se couche jamais. Les prévisions météorologiques nous avertissent cependant de quelques vagues de froid et d’averses (c’est l’Irlande), tout comme nous savons que notre vie ne peut être exempte de souffrance. […]
Au cours de ces journées, nous sommes sensibilisés et poussés à répondre à tous ces registres de l’être humain illustrés par Pâques. Lors de notre présence à la Cène, nous ressentons la joie et les tensions de la vie en communauté en nous lavant mutuellement les pieds et en apprenant ce que signifie la fidélité à une relation. Vendredi, nous sommes confrontés au plus profond refoulement de notre psyché, à la mortalité et à la peur qu’elle engendre, à la terreur de la perte absolue et de l’abandon. Nous apprenons qu’en y faisant face, nous pouvons percevoir un sens qui ouvre une porte par laquelle nous devons passer, mais qui reste un passage vers l’inconnu. Le samedi, nous nous reposons sur l’horizon de ce sens, en équilibre entre perte et découverte. Nous sommes incertains, voire non convaincus, mais nous ne nous sommes pas encore fermés à la possibilité, venue de nulle part, qui surgit du tombeau au petit matin pour nous inonder de la réalité d’une vie nouvelle.
Après la méditation
Mary Oliver, “Morning in a New Land”, New and Selected Poems, Boston, Beacon Press, 1992, p. 251.
Un matin dans un nouveau pays
Dans les arbres qui s’égouttent encore de la nuit, des oiseaux sans nom
S’éveillaient, secouaient leurs ailes comme des flèches et chantaient,
Doucement, comme des pinsons sortant d’un rêve.
Le soleil rose tombait, comme du verre, dans les champs.
Deux chevaux bais, et un gris pâle,
Leur encolure trempée de lumière, leur crinière sombre ruisselante,
Grimpaient la colline. Le dernier brouillard s’est dissipé.
Et sous les arbres, au-delà de la fragile dérive du temps,
Je me tenais comme Adam en son jardin solitaire
Ce premier matin, sorti du sommeil,
Se frottant les yeux, écoutant, séparant les feuilles,
Comme un papier sur un cadeau immense et incroyable.