Laurence Freeman, OSB, extrait de « Depth », Light Within (New York : Crossroad, 1986), pp. 105-107.
Parce qu’elle est si exigeante, la paix peut sembler presque plus effrayante que la violence – la violence que nous nous infligeons ou la violence faite aux autres. La paix en profondeur bouleverse notre monde. Nous devons entrer dans un très subtil équilibre de vie, la fine fréquence de l’Esprit, pour trouver la simplicité et la subtilité qui permettent de répondre au dynamisme du Christ. Entrer dans cette profondeur, s’ouvrir à cette profondeur signifie devenir vulnérable et rester vulnérable, non seulement dans la prière mais dans tous les domaines de la vie.
L’amour crée la vulnérabilité, la vulnérabilité de la compassion ou de l’engagement inconditionnel. Nous devons aussi apprendre à être matures et résilients, car être vulnérables signifiera que nous serons blessés et cela ne doit pas nous amener à nous refermer à nouveau. Cet équilibre particulier entre vulnérabilité et résilience fait partie de l’amalgame intellectuel, psychologique et spirituel unique qu’est un être humain. Chacun part d’un déséquilibre différent mais tous sont appelés au même équilibre et à la même centralité, au même enracinement en Celui qui a été blessé mais qui a su résister, dans la transcendance du pardon.
Après la méditation
Rabbin Arthur Waskov, extrait de « La Soucca de Shalom », The Nation, 20 septembre 2004, p. 24.
En 2001, quelques semaines seulement après les attentats du 11 septembre, la communauté juive a célébré la fête des récoltes de Souccot. Beaucoup l’ont fait en construisant une soucca – une hutte fragile avec un toit de feuilles, la plus vulnérable des maisons. Vulnérable dans le temps, puisqu’elle ne dure qu’une semaine par an. Vulnérable dans l’espace, puisque son toit doit être non seulement recouvert de feuilles, mais permettre de laisser passer la lumière des étoiles et les rafales de vent et de pluie. Dans nos prières du soir tout au long de l’année, alors que nous nous préparons à nous coucher dans un sommeil vulnérable, nous implorons Dieu : « Répands sur nous ta soucca de shalom – de paix et de sécurité. »
Pourquoi la prière demande-t-elle une soucca de shalom, plutôt qu’un temple, une forteresse ou un palais de shalom, qui seraient sûrement plus sûrs et plus sécurisés ? Précisément parce que la soucca est si vulnérable. Pendant une grande partie de notre vie, nous essayons d’atteindre la paix et la sécurité en construisant avec de l’acier, du béton, du solide. Mais la soucca nous le rappelle : nous sommes en vérité tous vulnérables. Si, comme le chantait le prophète Dylan : « Une forte pluie va tomber », elle tombera sur nous tous. Nous vivons tous dans une soucca. Même les océans les plus vastes, les bâtiments les plus puissants, les bilans les plus riches, les armes les plus puissantes ne nous protègent pas.
Il n’y a entre nous que des murs percés et des toits qui fuient. La planète est en fait un réseau de vie entrelacé. […] Le choix auquel nous sommes confrontés est plus large que la politique, plus profond que la charité. Il s’agit de savoir si nous considérons le monde principalement comme une propriété à contrôler, définie par des murs et des clôtures qui doivent être construits toujours plus hauts, toujours plus épais, toujours plus résistants, ou bien constitué principalement d’un tissage ouvert de compassion et de liens, de soucca ouverte à soucca ouverte… L’espoir vient en rendant visible cette simple vérité. Nous devons répandre sur nous tous la soucca du shalom.